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07 Jul 2021

Contrefaçon : prouvez que vous avez eu l’idée en premier

La contrefaçon, c’est copier une œuvre et l’exploiter sans l’autorisation de son auteur ou de ses descendants. Or, en France, vous bénéficiez d’un droit d’auteur dès que vous créez une œuvre considérée comme originale. En théorie, en tant qu’artiste, vous êtes automatiquement protégé.

Toutefois, en pratique, les choses ne sont pas si simples… Revendiquer la paternité d’une création, c’est bien, mais le prouver, c’est encore mieux. C’est même l’enjeu central dans ce type d’histoire comme l’illustre un contentieux opposant Jean François Bauret à Jeff Koons.

C’est en 2014, lors d’une exposition au centre Pompidou de Jeff Koons, que les descendants de Jean-François Bauret découvrent une sculpture en porcelaine inspirée très largement d’une photo réalisée par leur aïeul. Ces derniers, voyant de fortes ressemblances, décident d’assigner en justice le centre Pompidou et Jeff Koons en contrefaçon de droits d’auteurs.

Dans cette affaire, l’antériorité et les moyens de preuve ont permis aux descendants de Jean-François Bauret de condamner Jeff Koons et le centre Pompidou.

Vous l’avez compris. Si vous pensez être victime d’une contrefaçon, le plus dur n’est pas de le crier haut et fort. Le vrai challenge ? Prouver que vous avez été le premier à avoir eu l’idée et à la réaliser.

Finalement, comment être sûr que votre idée était la première et pas l’inverse ?

Déjouer la contrefaçon : prouver l’antériorité de votre œuvre

#1/ Une protection automatique du droit d’auteur 

Une œuvre de l’esprit est protégée automatiquement dès sa création sous réserve que celle-ci soit originale, c’est-à-dire qu’elle doit être empreinte de la personnalité de l’auteur.

Quand on regarde un Claude Monet, on sait que c’est lui. Il en est de même de Banksy ou des gouzous de Jace.

Cela est vrai pour la peinture mais aussi pour la musique, la photographie, les arts appliqués ou toute discipline qui implique de la création.

Vous créez une œuvre originale ? Un vase ? Une partition ? Une sculpture ? Alors, vous êtes protégé par le droit d’auteur.

Mais ce grand principe connaît vite des limites. Pourquoi ? Parce que sans preuve, vous ne pouvez ni revendiquer votre création, ni établir votre antériorité.

#2/ Quels sont les moyens à votre disposition pour prouver votre droit d’auteur ?

Le préalable : faites un travail d’enquêteur avant d’entamer des démarches

Vous devez absolument savoir depuis quand la “copie” existe. Il n’est pas rare de constater qu’une personne ait pu avoir la même idée, mais avant vous !

Selon le type de création, la première chose à faire est de vérifier s’il y a eu, ou non, un dépôt auprès de l’Institut National de la Propriété Intellectuelle (INPI). Toutefois, sachez que même en cas de dépôt, il est toujours possible d’agir si vous avez des preuves qui démontrent l’antériorité.

De la même façon, faites des vérifications auprès des organismes de gestion collective qui gèrent les droits d’auteur des artistes. Le plus connu d’entre eux ? La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, autrement dit la SACEM pour les musiciens. La bonne nouvelle, c’est qu’il existe d’autres organismes qui s’occupent des arts graphiques et plastiques, des arts visuels, des compositeurs etc.

Si ces deux voies n’ont rien donné, il ne vous reste plus qu’à mettre les mains dans le cambouis et regarder le passé de l’artiste : les interviews qu’il aurait pu donner sur ce que vous considérez comme “une copie”, les expositions, les photos instagram etc.

La charge de la preuve vous incombe

La charge de la preuve incombe au demandeur, c’est-à-dire à vous. Par conséquent, toute forme de preuve est possible pour justifier votre antériorité. 

Dans un premier temps, lorsque vous vous rendez compte de la contrefaçon, ayez le réflexe de vous constituer une preuve pour figer ce que vous avez sous les yeux. En général, l’appel à un huissier est plus que recommandé. A défaut, faites avec les moyens du bord : prise de photo ou copie écran etc. Juridiquement, vous vous en doutez, c’est moins fiable.

Dans un second temps, rassemblez tous les éléments concernant votre travail : tracer l’historique de vos réseaux sociaux si vous avez communiqué dessus, mail de travail, communiqué de presse, témoignages, l’envoi, à soi-même, d’un courrier cacheté tout au long du processus créatif.

Honnêtement, si c’était si simple, ça serait super. Mais, le problème, c’est que les preuves qui ne sont pas certifiées et authentifiées par un huissier ou par un service horodaté ont un poids juridique faible. Vous devez vous faire accompagner par un professionnel ou avoir recours aux services proposés par une plateforme en ligne afin de peser vos chances de réussite.

#3/Et si je n’ai pas déposé mon modèle ?

Bien faire la différence entre le dépôt auprès de l’INPI et les moyens de preuve du droit d’auteur

Avant toute chose, le dépôt, au titre des dessins et modèles, auprès de l’INPI concerne certaines créations. Le mobilier, les objets décoratifs, les uniformes, les écussons, les logos événementiels, les figurines, pictogrammes, etc. sont susceptibles d’être protégés.

Un dessin et modèle protège l’apparence d’un produit industriel ou artisanal ou d’une partie d’un produit (ses lignes, ses contours, ses couleurs, ses formes, ses textures).

Par exemple, une peinture déposée en tant que telle ne sera pas protégée à moins que sa texture, ou la technologie utilisée, soit spécifique. 

Si jamais vous ne pouvez pas bénéficier de la protection du dépôt, il vous reste tous les autres moyens de preuve dont le but est de justifier votre processus créatif dans l’élaboration de votre œuvre. 

Faire avec les moyens du bord :  les preuves ou le faisceau d’indices.

Si vous n’avez entamé aucune démarche auprès de l’INPI  ou tout autre organisme de gestion collective. Ne vous affolez pas ! 

Comme dit précédemment, le dépôt confère “seulement” une présomption de propriété. Autrement dit, vous pouvez toujours prouver que c’est vous l’auteur original, le père de ladite création. 

Or, dans le quotidien, on ne pense pas forcément à se constituer des preuves tout au long de sa création. Alors, quand vous n’avez absolument aucun élément flagrant qui tend à prouver votre paternité, que vous reste-t-il ?

Peu de choses à dire vrai. Mais vous pouvez tenter, à l’aide d’un avocat, de vous constituer un faisceau d’indices. Concrètement, ces indices rassemblés bout à bout permettent d’établir un fait juridique. Ici, il conviendra de voir avec votre avocat si c’est suffisant pour démontrer votre droit d’auteur.

Les moyens de preuve à votre disposition pour combattre la contrefaçon

#1/Le recours au fidèle huissier 

Avoir recours à un huissier, c’est la possibilité d’authentifier juridiquement votre création et de constituer l’antériorité de votre processus créatif et de vos œuvres en général.

Aujourd’hui, la démarche est encore plus simple grâce au développement des nouvelles technologies, une application développée par les professionnels du droit “Smartpreuve”. Pour pouvoir bénéficier de ces services, de façon dématérialisée, vous devez télécharger l’application gratuitement  (disponible sur IOS et Android) sur votre smartphone, créer un compte Entreprise puis choisir l’option qui vous convient le mieux : photos à certifier ou demander un constat. 

Le rapport qualité/prix est incontestable pour les prix proposés : 150€ en moyenne selon les services.

Le prix varie selon l’utilisation des services proposés : 

  • certification des photos : entre 7,50€ HT (1 à 5 clichés) et 19,17€ HT (11 à 20 clichés)
  • constat : variable selon la requête et à payé directement auprès de l’huissier

#2/L’enveloppe SOLEAU (à ne pas confondre avec le dépôt à l’INPI)

L’enveloppe SOLEAU est un moyen de preuve d’antériorité, dispensé par les services de l’INPI, mais qui ne donne pas lieu à un dépôt à l’INPI.

L’enveloppe SOLEAU vous permet de constituer une preuve d’antériorité sur votre processus créatif. Vous pouvez y intégrer :

  • les procédés sur l’élaboration de votre création ;
  • la démarche adoptée pour la création de votre oeuvre 

C’est un moyen efficace pour marquer au fer rouge la date à laquelle vous avez commencé votre projet.

#3/Le dépôt auprès de sociétés de gestion collective

Si vous êtes musicien, ce service vous concerne exclusivement.

La SACEM permet aux artistes de protéger leur musique, en collectant les droits d’auteurs des différents artistes. Cette collecte permet aux artistes de protéger la diffusion publique ainsi que la reproduction des contenus audios qu’ils créent. 

Pour que vous puissiez protéger votre œuvre, il vous faut devenir membre de la SACEM sur le site internet. Ensuite il vous convient de confirmer la qualité dans laquelle vous faites la démarche : auteur compositeur ou éditeur (qui dépendra de votre statut). Pour finaliser le dépôt, il vous sera demandé un justificatif d’identité, une preuve de votre création et le règlement de frais d’admission d’environ 100€.

La SACEM est la société de gestion collective la plus connue dans l’esprit des gens mais il en existe d’autres spécifiques à certains arts.

#4/La blockchain

La blockchain est un système informatique constitué de serveurs de stockage permettant de transmettre des informations de façon sécurisée et infalsifiable.

Dans son fonctionnement, la blockchain vous permet à chaque étape de votre création d’enregistrer et d’horodater, c’est-à-dire donner une date certaine à votre œuvre.

C’est indépendant et sécurisé. Et le prix est accessible. On vous invite à regarder par exemple les services de BlockchainyourIp.

Marie-Abigaëlle Massamba

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