Modèle non déposé : que risquez-vous ? Afin qu’il n’y ait pas de méprise, il convient d’abord de rappeler quelles sont les créations qui peuvent être protégées au titre des dessins et modèles.
Concrètement, si vous créez un produit nouveau, avec un caractère propre, alors vous pourrez protéger son aspect : les formes, les courbes, le design ou encore les couleurs.
Vous êtes l’heureux créateur d’un sac ? La fabuleuse créatrice d’un grille-pain ? A partir du moment que cela concerne un objet industriel ou artisanal, c’est bon !
Dans l’idéal, il faut effectuer un dépôt auprès de l’Institut National de la Propriété Intellectuelle, avant la divulgation de votre création.
Malheureusement, nous ne vivons pas dans un monde idéal, et bien souvent, vous n’avez pas le réflexe d’assurer vos arrières.
Alors, que se passe-t-il lorsque vous êtes copié mais que vous n’avez pas entamé de démarche pour protéger votre création ? Même si vous n’avez pas effectué de dépôt, pouvez-vous quand même défendre vos droits ?
Le droit d’auteur est un droit intrinsèque qui appartient à tout artiste produisant une œuvre originale imprégnée de sa personnalité.
Mais comment définir l’originalité d’un produit ? Si on vous dit Jeff Koons ou Jean Paul Gaultier, on imagine aisément que vous pourriez reconnaître leur style…non ?!
Il doit en être de même pour vous ! En regardant une de vos créations, on doit se dire “tiens, mais c’est vraiment “sa” patte”. Tous les domaines sont touchés : le design, la musique, la sculpture….
La particularité ici, c’est que le droit d’auteur va concerner un objet. Autrement dit, c’est l’apparence d’un produit et son esthétique qui sont protégés par le droit d’auteur. Des exemples pour la route ? Une chaise, des vêtements, un stylo, une voiture etc.
Le dessin ou modèle communautaire non enregistré (DCMNE) est un moyen de protection permettant la protection automatique de votre modèle ou dessin par le fait de sa première divulgation au sein de l’Union Européenne.
Il n’y a aucune démarche administrative pour pouvoir en bénéficier. Mais la problématique reste la même : en cas de litige, il va falloir travailler !
Bien que vous considériez que votre création soit originale, il convient tout de même de le prouver. Oui, sans preuve, il est impossible de revendiquer quoi que ce soit !
C’est pourquoi on conseille aux artistes de se constituer des preuves tout au long du processus créatif : le recours à l’huissier avec l’option Smartpreuve, l’enveloppe SOLEAU, le système de la blockchain sont autant de moyens à votre disposition pour protéger votre création à chaque étape.
Non seulement vous protégez votre travail si quelqu’un souhaite s’approprier votre création, mais en plus vous assurez votre défense si quelqu’un vous accuse de contrefaçon.
Ainsi, vous prouvez le cheminement adopté pour votre réalisation. On ne le dira jamais assez : la preuve est bel et bien l’alliée indispensable du processus créatif.
Pour revendiquer la paternité d’une création c’est simple. Il faut que votre œuvre soit originale et que vous soyez le premier à l’avoir réalisée.
On ne le répétera jamais assez. C’est important de se constituer des preuves à chaque étape, avant que le produit final ne soit fini : photos, captures d’écrans, constat d’un huissier etc.
Imaginons le pire : un concurrent qui a eu vent de votre travail dépose un modèle que vous avez créé le premier. Qu’allez-vous faire si vous n’arrivez pas à démonter que votre processus créatif était antérieur ?
Par exemple, si vous créez une robe, gardez l’historique de tout ce que vous avez fait : les croquis, le patron, les prototypes, les échantillons… Il existe beaucoup de moyens à votre disposition pour horodater vos réalisations.
Attention, il est important de bien différencier ces deux domaines :
Le dépôt de votre œuvre est important : vous bénéficiez d’une protection de la propriété intellectuelle, en plus du droit d’auteur, sur une durée minimale de 5 ans. Ici, vous pouvez facilement agir en contrefaçon contre un tiers.
Cependant, si vous déposez une œuvre dont vous n’avez pas la paternité, le droit d’auteur intrinsèque à l’artiste original peut être pris en compte si vous êtes assignés en contrefaçon. Dans les faits, la tâche ne sera pas aisée, mais cela sera tout de même possible… d’où l’intérêt de protéger votre processus créatif !
On en a déjà parlé précédemment concernant le droit d’auteur. Mais oui, si vous n’avez pas déposé votre modèle ou dessin, il va falloir se retrousser les manches.
Afin de vous convaincre de cet élément essentiel, on a décidé d’illustrer nos propos avec un célèbre litige opposant le club de Foot de Valence à la société DC comics.
En 2019, pour fêter leur 100 ans, le club de football a décidé de créer un logo d’une chauve-souris orange sur fond noir.
La société DC comics a déposé une plainte auprès de l’Office européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) : pour eux ce logo pouvait causer une confusion entre la BD Batman et le logo du club.
Or, le club de football de Valence, fondé en 1919, arborait déjà ce symbole à sa création, tandis que la BD Batman a été illustrée pour la première fois en 1939. La preuve de l’exploitation par le club, leur a permis de prouver l’antériorité alors que le club n’avait rien déposé.
D’expérience, on sait que les créateurs ne pensent pas forcément aux questions juridiques liées à leur travail.
Mais en cas de contrefaçon, peut-être avez-vous conservé des éléments probants et pertinents ? On pense notamment aux photos, captures d’écran, publications sur les réseaux sociaux… Attention toutefois aux vidéos ! Ces dernières ne montrent pas clairement l’instant présent : elles peuvent ne pas être considérées comme étant des moyens de preuve concrets.
A ce stade, rien ne prouve à 100% votre antériorité mais tous les éléments ajoutés bout à bout peuvent démontrer que vous avez bien la paternité de la création. C’est ce qu’on appelle des faisceaux d’indices et croyez-le ou non, ils peuvent vous tirer d’affaires !
Votre travail est de protéger votre travail au fur et à mesure avec des outils juridiques dignes de ce nom.
On en a parlé précédemment mais pour ancrer les réflexes, rien de mieux que la répétition !
Le recours à l’huissier est un moyen d’ authentifier chaque étape de votre travail. Certes, cela a un coût mais le jeu en vaut la chandelle si c’est une création que vous considérez comme essentielle. L’application Smartpreuve vous propose le même service mais de façon dématérialisée, à un coût plus abordable.
Il existe aussi la blockchain ainsi que l’enveloppe SOLEAU proposée par l’INPI. A vous de faire votre benchmark pour utiliser ce qui vous convient le mieux
La mise en demeure est une réclamation officielle généralement par lettre recommandée avec accusé réception. Elle est adressée au tiers et explique clairement ce que vous souhaitez obtenir de lui en précisant un délai.
Une lettre de mise en demeure (MED) est importante ! Cela montre votre volonté de résoudre le litige de façon amiable sans passer devant les tribunaux. C’est essentiel pour enclencher le dialogue entre vous et le tiers que vous accusez en contrefaçon. Vous exposez clairement ce que vous lui reproché.
Dans le cadre de la contrefaçon, votre objectif sera de faire cesser l’exploitation frauduleuse de votre œuvre.
La mise en demeure est réalisée de façon manuscrite : à ce stade, l’idée est de poser le premier échelon pour entamer une négociation, et cela se fait forcément par écrit. L’enjeu est bien évidemment de trouver une solution amiable avec signature d’un accord afin d’éviter la lourdeur et le coût et l’incertitude des tribunaux.
Être accompagné d’un avocat à cette étape est primordial. Cela prouvera votre détermination et surtout, vous confierez le bébé à une personne dont c’est la spécialité !
A tort, on pense souvent que l’avocat est inaccessible et vous n’avez pas forcément le réflexe d’en appeler un.
Loi et Moi vous propose le service de notre avocat spécialisé en propriété intellectuelle qui se charge de la rédaction de cette lettre de mise en demeure et pose les premiers jalons pour une négociation.
L’un des avantages de la phase pré-contentieux, c’est que vous tentez de régler à l’amiable le litige avec le tiers. Le dialogue est encore ouvert et surtout, si vous trouvez une solution amiable, vous gagnerez un temps précieux.
Le plus gros avantage reste de l’ordre financier. Vous économisez beaucoup et risquez moins d’engager des fonds dans une procédure amenant devant les tribunaux.
Pour résumer : Dialogue, temps et argent, la phase pré-contentieuse est la plus adaptée et avantageuse.
L’action en contrefaçon est une procédure inscrite dans la voie judiciaire, ayant pour objectif, d’arrêter l’exploitation totale ou partielle, la reproduction ou imitation d’une œuvre sans le consentement de son auteur.
Il y a la voie pénale qui sanctionne par une amende et/ou une peine de prison le contrefacteur et la voie civile qui vous permet de demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi.
Les délais pour agir sont respectivement de 3 ans et de 5 ans : donc, ne trainez pas pour mener les négociations à l’amiable, au cas où les choses se corsent !
Dans les deux cas, vous devez vous faire assister par un avocat (oui, ici la représentation est obligatoire). Pensez aux inconvénients et au gain espéré : faites le bon choix !
On est pas là pour vous dire de laisser tomber, loin de là. Mais quand on s’engage dans la voie judiciaire, il faut être conscient que cela peut vite devenir un sacerdoce.
Tout d’abord, la voie judiciaire est longue. En 1ère instance, il peut y avoir des renvois, des demandes d’expertise et surtout un appel. Cela prend donc au minimum 2 ans devant les tribunaux.
Enfin, c’est évidemment coûteux, sans compter que si vous perdez, vous pouvez être poursuivi pour procédure abusive. Les honoraires ? Ils varient en fonction des avocats mais comptez au minimum 1500 euros.
Avant de vous lancer dans cette périlleuse aventure, discutez avec votre avocat du coût d’une telle procédure, du temps alloué et des chances de gagner (devant les tribunaux, rien n’est sûr à 100%).
Marie-Abigaëlle Massamba